Quand vient le temps des semis de maïs...
Semoir de maïs
© L'école des Céréales

L’école des Céréales

Quand vient le temps des semis de maïs...

Alors que se profile la période des semis du maïs, L’école des céréales est partie à la rencontre d'Éric Bonnefoy, céréalier en Bourgogne Franche-Comté, qui cultive notamment du maïs sur ses terres situées entre Besançon et Dijon.

L’école des Céréales : Nous approchons du mois de mai qui correspond à la période des semis de maïs, pouvez-vous en rappeler le calendrier cultural ?

Éric Bonnefoy : Semée, selon les régions, entre la fin avril et la première quinzaine de mai, la graine de maïs doit germer dans la dizaine de jours qui suit sa mise en terre. Ensuite, pour schématiser, la croissance du maïs se déroule en deux temps :

  • d’abord la floraison au mois de juillet, qui correspond à la période de fécondation des plantes,
  • puis la récolte, entre fin septembre et mi-octobre.

Les variations dans le calendrier sont notamment liées au choix de semences et des variétés cultivées puisque le maïs fourrage (maïs plante entière pour nourrir les animaux) est récolté avant le maïs «grain». Elles s’expliquent aussi par la diversité climatique des régions où il pousse. Cette notion calendaire est très importante, car elle concentre l’attention des agriculteurs qui vont avancer au rythme de la nature. Pour la culture du maïs, on compte le « temps de lumière captée ». Donc plus on sème tôt, plus on aura un temps long entre le semis et la moisson et donc suffisamment de jours d’ensoleillement et de lumière, assurances de bonnes récoltes. Le maïs a également besoin de chaleur.  Un bon ensoleillement après les semis permettra par exemple la germination des grains dans la semaine suivant les semis. Mais là encore, la chaleur ambiante ne suffit pas, il faut aussi que la température du sol soit suffisante ! C’est pourquoi, pour décider si je peux commencer les semis, je prends régulièrement la température avec un petit thermomètre que je plonge dans la terre.

L’agriculteur qui veut faire pousser du maïs ne doit pas se précipiter, le risque de traverser une période de froid peut se produire à tout moment. Les anciens parlent des saints de glace non sans raison ! Saint Mamert, Saint Pancrace et Saint Servais étaient célébrés pour conjurer la quinzaine de mai (successivement les 11, 12 et 13 de ce mois) où se situent les dernières nuits froides de fin d'hiver. Aujourd’hui l’expression proverbiale rappelle que c’est la fin de la période des gelées. Ce qui est compliqué, c’est qu’il n’existe pas de règles, mais des contraintes qu’il faut réussir à gérer au mieux, avec l’expérience, en regardant dans le champ du voisin, en comptant sur la chance aussi… 

 

L’école des Céréales : Hormis les conditions climatiques, quelles sont les contraintes à prendre en compte ?

mais_demi_direct
© L'école des Céréales

Éric Bonnefoy : Tout d’abord, rappelons que le maïs se sème avec un semoir qui dépose grain par grain. À la différence du blé par exemple. Il existe aujourd’hui plusieurs façons de semer du maïs : soit en semi « direct », soit selon la méthode traditionnelle.

Dans le premier cas, le sol est livré à lui-même ! Il n’y a pas de phase préparatoire de labours, ce sont les débris végétaux de la culture précédente qui par le jeu de la décomposition vont permettre l’activité microbienne. Les vers de terre viennent ainsi chercher en surface leur nourriture et repartent en sous-sol creuser les galeries qui permettront l’oxygénation des sols. Avec la méthode traditionnelle, ce travail est réalisé par des outils à dents qui soulèvent la terre en profondeur.

Sachant que le facteur « température du sol » impose le moment de semer le maïs, il faudra décaler ou non la période de semis selon que le champ aura été laissé en régénération ou labouré.  Car, au sortir de l’hiver, une terre qui a été labourée se réchauffe plus vite que celle qui a été laissée livrée à elle-même !

 

La germination doit aussi se faire rapidement pour éviter les désordres provoqués par les prédateurs parmi lesquels les corbeaux figurent en bonne place. Dans les champs, après les semis, on peut repérer facilement leur manège : comme s’ils savaient où chaque graine est semée, les volatiles progressent méthodiquement le long des lignes et piquent la terre pour déterrer sans coup férir le précieux mets...

(Dans l'image ci-contre, la présence dans le champ des anciens pieds de maïs de l'année précédente révèle qu'il s'agit d'une culture en semi « direct », sans travail du sol) 

 

L’école des Céréales : Pouvez-vous décrire la manière dont vous semez le maïs sur vos terres ?

Éric Bonnefoy : Même si on parle de semis, les graines de maïs sont semées en terre, entre 3 et 5 cm de profondeur ! Le maïs est « semé » en ligne par doses comprenant un nombre précis de grains par hectare, nombre qui varie en fonction de la variété souhaitée. Avec le maïs fourrage, on peut prévoir une densité importante à l’hectare, car on privilégie la plante entière plutôt que le grain ! En revanche, pour le maïs alimentaire, les rangs des épis seront plus lâches, car les grains devront être bien secs avant d’être récoltés. De même, pour avoir de belles grappes, il ne faut pas trop de grains au mètre carré. Selon l’option retenue, l’écartement entre chaque graine semée variera de 70 à 90 cm, et le calibrage des doses de grains est très précis : aux alentours de  85 000 – 90 000 grains à l’hectare dans le cas de la culture du maïs fourrage, 75 000 – 85 000 grains pour les cultures de maïs grain.

Être agriculteur, c’est être mathématicien ! Maîtriser le calcul pour définir le nombre de grains, mais aussi être bon en géométrie, les champs cultivés n’étant jamais parfaitement rectangulaires ! Pour obtenir ces rangées bien alignées d’épis devant lesquelles chacun s’étonne en se promenant dans la campagne l’été, il faut commencer sur le grand côté du champ, en traçant une ligne, on sème, puis avec l’aide du GPS on trace les suivantes parallèlement à la première. Entre chaque alignement, des chemins sont tracés pour permettre à l’agriculteur de passer régulièrement au milieu des rangs pour « désherbiner » (sarcler avec une bineuse pour retirer les mauvaises herbes). Une action qui peut se faire manuellement ou mécaniquement et pour laquelle, un petit robot qui était en démonstration au dernier salon de l’agriculture, semble promis à un grand avenir !